Par où commencer…
Mmh j’en ai presque oublié comment commencer mon article à force de vous écrire de moins en moins souvent. Bonnes résolutions tout ça tout ça, il est donc temps de s’y remettre. Mes mains commencent à trembler et les mots commencent à s’impatienter sérieusement. Ne vous inquiétez pas les gars, vous allez sortir.
Au vue de mon dernier article, le titre de celui-ci aurait du se nommer « la belle vie de patates – Partie II ». Pardonnez moi donc ce revirement inadhérent à une suite logique que je tends, tant bien que mal, à suivre en temps normal. Mais j’ai opté pour un titre plus « approprié ». J’ai dû me résoudre (à contre coeur… OU PAS) à m’adapter aux circonstances et à réagir quand c’était nécessaire (à ma plus grande déception… OU PAS). La belle vie de patates a donc été éjectée du tableau pour reprendre de la route. Ne la chassons cependant pas trop vite car elle fut malgré tout mon compagnon de voyage de ces 5 dernières semaines (et des 5 semaines d’avant aussi d’ailleurs pffiouu ça fait long). Et bien que je sois assez heureuse/soulagée d’avoir tourné cette page de mon carnet de voyage, lourd en tonne des pommes de terres, elle mérite tout de même d’être retranscrite histoire que vous y pigiez quelques chose à ce récit un peu loufoque.
Nous en étions donc au début du mois de Mai. J’étais toujours dans la région de Ballarat ; cette charmante ville dont j’arrive à peine à encore prononcer le nom. Je quittais mon dernier poste chez Anthony pour rejoindre la ferme de Richie. Il est important de dire, tout de même, qu’Anthony fut le boss le plus cool, compréhensif et surtout honnête que j’avais connu depuis mes débuts (et croyez moi ça se fait rare dans ce pays exploiteur de pauvres backpackers en chasse de quête désespérée de money, money). Je sentais qu’il était temps pour moi de changer d’air et cette petite pomme de terre en forme de coeur que m’avait offert mon ancien patron la veille de mon dernier jour, le confirmait bel et bien. (? sans commentaires…)
C’est donc pleine d’espoir et de motivation que je me lançais dans cette nouvelle aventure, regonflée à bloc comme jamais, me persuadant que quelques semaines/mois de patates en plus n’allaient pas me tuer et que ça allait surtout me permettre de profiter par la suite et d’être tranquille pour un bon moment. Salaire identique, nombre d’heures par semaine/décent, accomodation hyper cheap, trou paumé au milieu de la campagne empêchant toute dépense inutile ou excès en tout genre, j’étais à nouveau convaincue, un peu trop optimiste sans doute, que ça allait bien le faire.
Avec Hendjie, nous emménagions finalement dans la chambre qu’on louait dans la charmante petite habitation très chaleureuse de Steve, lui-même collocataire de mon nouveau patron, Richie (vous suivez toujours?) au lieu de camper (ce qui était le plan initial). J’étais un peu rassurée de ne pas revivre dans ma voiture compte tenu de l’hiver qui approchait, mais avec du recul ça aurait peut-être été mieux, haha. Tapis couleur moutarde-brune-ça-pue-et-c’est-moche, lumières blanches « ambiance hôpital » (ou asile désaffecté j’ai pas encore décidée haha), chaleur ambiante tournant autour des 5° (parce que les chauffages connaissent pas ça ces cons), et présence de meubles/affaires aussi minime que ce que représente mon sac à dos de voyage, on était bien bien bien. J’en oublierais presque le changement de catégorie de collocataire passant de « anciens collocs australiens jeunes et plutôt sympas » à (excusez-moi d’avance) « vieux monsieur habité par un regard permanent aussi vide que mon compte en banque à l’époque ». Bon, c’était pour la bonne cause, on y croyait, plus que jamais. On y croit les gars, on lâche rien, on lâche rien.
Notre première semaine à la ferme se passa plutôt bien. Ambiance à la franche rigolade, nous sympathisions avec Richie, notre boss, assez direct et franc mais plutôt positivement et son fils Brandon qui avait plus ou moins notre âge et qui était chargé, à son plus grand plaisir, de reprendre le business du padre plus tard. Mec, t’as pas le choix, ta vie c’est ça. Tu te rends compte en voyant ce genre de famille que t’es quand même bien chanceux de pouvoir faire ce que tu veux de la tienne.
On eu droit à nos premières sorties « culturelles » de la région. Richie nous emmena faire le tour du quartier. « Alors là, c’est le champs de mon frère, là c’est la prairie de machin brole, la c’est les vaches du voisin mais les miennes sont mieux, à votre droite le quartier général des fermiers du coin » Bref vous voyez le genre. Nous écoutions donc avec la plus grande attention du monde la description de ce nouveau monde dont j’étais ravie d’être le nouveau membre. « On va boire un verre ? » Haaa ouai ça ça me plait Monsieur, toi je t’aime bien. Entrée non remarquée dans le bistro du village de « Clunes », aux allures cowboy western digne d’un vrai film. Hendjie et moi espérions passer inaperçues dans le décors, mais je ne sais pas pourquoi, ça n’a pas fort marché. Quoiii toi là bas, tu sous entends que j’ai pas le profil ?
Non plus sérieusement, ces expériences qui me rappelaient parfois mes « classes poney à la ferme » nous offrit quelques grands moments de solitude/ mal à l’aise/ fou rire en tout genre. Et c’était encore sans compter sur l’événement « Twist potatoes » du week-end d’après ou encore la foire du marché au bétail de la semaine suivante. Allooo, allooo, j’appelle ma vie au micro, est-ce que quelqu’un l’aurait vu partir par hasard ? Je sais plus trop ce que j’en fais. Dérives liées à mon esprit un peu confus et encore tourmenté par le rappel de tous ces souvenirs un peu absurdes, pardon pardon.
Lors de la deuxième et troisième semaine à trier des patates, on commençait à sentir que sous des apparences plutôt cool au départ, ça commençait en réalité un peu à puer du cul cette histoire (pardonnez moi l’expression). Haaa ben voila, là on revient à la normale. Nombre d’heures de travail en chute permanente, fait assez démotivant, ajouter cela la non réception de quelconque salaire sur nos comptes en banque, j’étais aux anges. Madame méfiance aurait bien fait de pointer le bout de son nez un peu plus tôt. Alors que flottait dans ma tête la petite voix qui me disait « Jo t’es encore entrain de te faire entuber je pense » et que l’autre petite voix lui répondait « aaah ouai tu crois ? Mais nooon t’es parano » , j’essayais un peu naïvement d’encore espérer que la situation pouvait changer. Je pris donc les heures qu’il y avait à prendre, me disant que ça serait toujours mieux que rien mais en commençant doucement à penser à décamper de là.
Rajoutons à cette atmosphère chaleureuse le fait que je vivais avec un mec avec qui mes seuls sujets de conversation étaient les assiettes, le four, la machine à laver et les tuperwares dans le frigo. Autant vous dire qu’avec cette certaine monotonie retrouvée dans mon mode de vie, combinée au fait que ça se passait pas trop comme je le voulais niveau boulot, j’étais en train de bouillir à l’intérieur.
La monotonie, est de base ce que tout voyageur cherche à suivre en partant à l’aventure. En quête de surprises, de challenges et de découvertes, il devient compliqué une fois que vous avez gôuté à ce doux plaisir de voyager et de vous jeter en permanence dans l’inconnue, de réatterir dans l’ennui le plus mortel du monde.
Début de semaine passée, lundi critique et décisif. Réveil difficile avec ce sentiment de « si mon boss me lâche encore un truc qui m’énerve, j’explose ». En plein milieu de matinée, alors que je triais tranquillement mes patates sans rien demander à personne, le mec m’envoie une première attaque avec son air de bull-dog affairé, que je fais d’abord mine de ne pas entendre/comprendre. Deuxième missile en vue, je vais exploser, je vais explooooooser. HA VOILA CA Y EST, explosion nucléaire haha. Non sérieusement, je veux bien garder mon calme mais va pas falloir trop abuser non plus coco. Puis les potes, vous connaissez mon tact, ma patience et mon calme légendaire :):):)
Après une journée quelque peu, conflictuelle et animée, j’envisageais les prochaines options possibles. Alors laissez moi réfléchir ; me tailler, me tailler, ou me tailler. Ce n’était plus qu’une question de temps, je le savais avant que mes nerfs pètent définitivement à la gueule de Richie.
Les prochains jours ont radicalement accéléré le processus. Alors que je m’étais fixée de tenir jusque fin de semaine, mercredi soir c’était la crise.
Tentant tant bien que mal de calmer le climat général et d’ainsi diminuer les tensions, les choses semblaient en apparence se résorber. A la veille du jeudi matin, je recevais un message de mon boss s’excusant de s’être énervé contre moi. Etonnant…. Je comprends par ailleurs qu’en plus de s’excuser et de me jeter quelques fleurs sur ma façon de travailler, il m’annonce par la même occasion qu’Hendjie sera virée le lendemain. WTF, j’ai zappé un épisode ? Il est schizo le mec ?
Si j’avais encore une once d’espoir quant au crédit que j’accordais à ce fameux personnage, elle s’était maintenant envolée. Alors toi, t’as cru que j’allais me faire gueuler dessus, sans recevoir de salaire, et rester dans ton trou pourri à patates pour me faire chier sans ma pote en plus ?
Jeudi matin dernier, j’expliquais donc à Richie que je ne resterais pas dans ces conditions et qu’il pouvait bien aller se mettre ses foutues patates où je pense (hum hum).C’est, à ma grande surprise, que très calmement je mis fin à la conversation en lui faisant gentiment comprendre qu’il y a quelques principes moraux sur lesquels je n’étais pas encore prête à m’asseoir. Appeler ça un mauvais caractère ou une tentative désespérée de maintenir un peu de dignité humaine, je m’en cale.
Pendant longtemps, la quête d’économies m’avait obsédée je dois bien l’avouer. Imaginant mes futures voyages et roadtrips, je n’étais plus fixée que sur cet unique objectif .
Force est de constater qu’heureusement pour moi, je m’étais doucement réveillée pour revenir en plein réalité. Je n’étais pas ici pour ça. Et en me laissant entraîner dans cette situation que je subissais de plein gré, je perdais peu à peu mes propres repères. Alors comme dirait les potes, On se sort les doigts du cul! Il était temps de bouger. Et bien loin de préférence.
Après une phase d’excitation mêlée à un certain soulagement que nous partagions avec Hendjie, nous remballions donc nos dernières affaires et décampions de là illico presto. Café, il nous faut du café. Nous sommes allées se poser en ville et bien que l’adrénaline liée au fait d’avoir tout envoyer péter était encore présente, un autre sentiment étrange courrait vers nous, d’un air un peu inquiet ou dubitatif. « Dis au fait, du coup, on fait quoi maintenant ? ». Plus de boulot, plus de maison et avec l’hiver qui approchait ça nous amusait pas des masses de refaire du camping. Un fou-rire général nous permit de sortir de toute angoisse dûe à une vision complètement inconnue et incertaine de l’avenir.
Hendjie, ayant trouvé l’amooooour à Ballarat, il était évident que nos priorités n’allaient pas dans le même sens. Elle voulait rester, et moi je voulais surtout bien partir. C’est donc en mode solo, que je reprenais ma voiture, roulant vers heu…, bref roulant quoi.
Pour la première je me rendis véritablement compte que la solitude ne me dérangeait pas. Et quand j’entends maintenant ce mot raisonner dans ma tête, il ne me parait d’ailleurs aucunement négatif. La liberté, la sensation de faire ce que tu veux quand tu veux, d’aller où tu veux, et d’avoir la paix la plus totale. Un sentiment de plénitude me permettait donc de profiter des jours qui ont suivi.
Randonnée de quelques heures au sein du Grampians National Park, repos, conduire les cheveux au vent en écoutant ma musique à fond, chanter à tue tête sans personne pour me dire que je chante faux. Grasse maaat, Oui je sais on dit « l’avenir appartient aux gens qui se lèvent tôt blablabla » et ben moi je dis que j’emmerde mon réveil et que l’avenir appartient à ceux qui prennent le temps de vivre. Bref, je réalisais qu’il m’en fallait très peu pour être heureuse. Et c’est sans doute la plus belle découverte que j’avais faite depuis que j’avais quitté la Belgique il y a déjà plus de 8 mois maintenant. Rien, ni mon pneu crevé d’il y a quatre jours, ni ma batterie de voiture morte d’il y a deux jours, ni aucune erreur ou maladresse en tout genre, ni aucun doute quant à l’avenir, ne me ferait changer d’avis.
Après quasi une semaine de voyage en solo, il était temps de penser un tout petit peu à la suite. J’ai donc décidé de …, de faire exactement le contraire de ce que j’avais prévue. On va prendre quelques vacances et aller voir un peu de pays en attendant de se relancer dans la galère de boulot, qui peu après tout un peu attendre. Suis certaine qu’elle sera là en revenant, y a paaaas de soucis.
Et au fait les potos, j’ai oublié de vous dire mais je vous publie ce dernier article de l’aéroport d’Adelaïde. D’ailleurs mon avion décolle d’ici peu, faudrait pas que je le loupe.
Mais si je devais achever mon récit par un monologue bien bateau et bien barbant, je dirais que surtout ne réfléchissez pas trop, n’essayez pas de suivre une ligne de conduite que vous pensez être obligé de respecter. Prenez des décisions insensées, parfois, prenez des risques, aller voir ce qui y a par là bas tout loin quitte à vous planter, et n’ayez aucun regret. N’ayez aucun regret d’avoir accompli ce que vous avez entrepris, parce que quoi qu’il arrive, ça vous aura fait voyager. Et partir voyager a indéniablement été la plus belle, la plus grande, la plus effrayante mais la plus excitante des aventures que j’ai connues jusqu’à présent dans ma vie.
Sur ce, je vous dis ciao ciao les copains, le désert australien m’attend et il se pourrait bien que j’ai bien envie d’y rester un petit peu. Puis je sais pas pourquoi, mais j’ai l’étrange impression qu’il y a encore des surprises qui m’attendent par là bas…. Suite au prochain épisode.
Prenez soin de vous, ici on en fait autant ! (Pas eu le temps de charger mes dernières photos sur ma gallerie Flickr mais toute façon y a peu près que des patates alors vous ratez pas grand chose:) )
Santé à l’apéro, vous me manqueeeez
Jo
Quel sens du suspense… N’attends pas trop pour la nouvelle saison de la série 🙂