28 décembre 2017
Il est temps de reprendre le récit là où nous l’avions laissé. Après nos dernières découvertes vietnamiennes, nous nous apprêtions à poursuivre notre route vers le Nord; direction Sapa. Sapa, une région assez lointaine mais très connue des voyageurs. On a tous ou presque en tête ces infinités de vallées montagnardes abritant des terrasses de rizières à n’en plus finir. Bien que ce ne soit pas la saison idéale, nous nous mettons en quête malgré tout de nous y rendre, se persuadant que quoi qu’il arrive, il doit y avoir de quoi faire là haut. Après une brève escale d’une nuit dans la capitale d’Hanoi que nous ne découvrons que très peu, nous partons donc dès le lendemain pour rejoindre notre prochaine destination. Malgré la grisaille et le brouillard, nous découvrons peu à peu cette région montagnarde aux versants raides de part et d’autre de la route que nous empruntons. Le paysage change à nouveau et nous découvrons alors avec excitation nos premiers paysages du nord. Mais une fois finalement arrivées à Sapa, après avoir serpenté pendant des heures de bus les tournants infinis de cette route qui ne cesse jamais de monter, nous déchantons quelque peu.
Ville en travaux, boueuse, froid glacial et brouillard à ne même pas y voir son voisin, nous sommes un peu dans le flou et c’est bien le cas de le dire. Moi qui n’avait pas connu d’hiver depuis très longtemps, j’ai quasi l’impression d’avoir atterrie au pôle Nord. Entre ne pas avoir la météo idéale et ne rien voir du tout, il faut dire qu’il y a encore de la marge. Nous avions prévu d’exécuter un trek de deux jours à travers les villages ethniques Hmong de la région. Quelque peu découragées par le ciel peu clément, nous déciderons finalement de ne faire qu’un jour, histoire de ne pas être montées pour rien mais de ne pas en chier plus qu’autre chose non plus pendant 24h. Nous nous remotivons pour notre escapade du lendemain, plein d’espoir, d’envie et de curiosité. L’agence avec laquelle nous avions booké notre trip présente une philosophie assez intéressante et une approche plutôt respectueuse des minorités ethniques, ce qui déjà me plait pas mal. Effrayée par les nombreux récits touristiques que j’avais lus sur des dizaines de blogs, qui vous emmènent dans une vallée quasi superficiellement reconstituée, à la façon mauvaise mise en scène de la vie rurale des ethnies, j’avais un peu peur de tomber dans le cliché des sketchs voyeurismes et peu authentiques de l’affaire. Heureusement et pour notre plus grand bonheur, l’expédition qui nous attendait semblait s’écarter de ces faux semblants et sentiers surbalisés.
Le boss de l’agence nous narre l’histoire de ces peuples autrefois migratoires, précisons le, nullement vietnamiens, en retracant surune ligne du temps le parcours qui les a aujourd’hui mené à vivre de façon permanente ici. Entre business d’opium et exploitation, guerres d’Indochine et du Vietnam, profit et interventions étrangères (françaises et américaines principalement) pour tenter de « conquérir » la région, nous tentons de comprendre les tenants et aboutissants de cette histoire complexe mais très intéressante. Je ne vous en ferai pas le récit complet mais pour les passionnés il y a de quoi potasser sur l’affaire 😉 Toujours utile de s’informer un minimum sur les peuples dont nous voulons aller à la rencontre. Et en parlant de rencontre, c’est avec Chu, notre guide locale Hmong, que nous entrons en contact pour entamer notre trek journalier. Dès nos premiers échanges, nous comprenons très rapidement que nous avons à faire à une sacré personnalité. Et nous commençons donc au départ de Sapa, à marcher en sa compagnie. Elle répond à nos nombreuses questions et semble représenter une certaine figure importante d’une des nombreuses ethnies Hmongs. L’échange est facile et chaleureux, elle parle un anglais d’un niveau assez surprenant. Le genre de personne qu’on a tendance à écouter sagement, avec un grand respect et une certaine admiration. Nous en apprenons pas mal sur la culture, les traditions, le mode de vie et tous les autres aspects qui tournent autour du coeur de ces peuples.
Après un bref passage au marché local, en vue d’acheter de quoi nous nourrir ainsi que la famille qui nous accueillera pour le lunch, nous entamons bientôt notre ascension. Il semblerait même qu’un semblant d’éclaircie apparaisse. Ce qui nous permet enfin d’ouvrir les yeux sur ces paysages surprenants. Les rizières sont inondées, mais le spectacle reste tout de même magnifique. Nous nous écartons rapidement de la route principale pour commencer à monter à travers différents villages où nous ne croiserons presque aucun touriste. C’est probablement humainement que l’expérience fut la plus intéressante. Nous étions clairement venus pour les paysages mais à défaut de ne pas avoir pu en profiter pleinement, nous en avons appris bien plus que ce que nous avions imaginé sur l’histoire de ces peuples montagnards d’une grande diversité. Après deux bonnes heures de marche, nous nous arrêtons pour une longue pause du midi dans une famille Hmong. La « maison » est très très très rustique, envahie par la fumée du feu, il n’est malgré tout pas compliqué de comprendre qu’il n’y a pas grand chose; une maigre paillasse pour dormir, un espace pour cuisiner, une semi mezzanine pour entreposer les provisions et un semblant d’espace central pour manger. Nous en avons très vite fait le tour. Nous réalisons facilement que ce que nous avons amené à manger compose un dîner plus que l’ensemble de leurs repas sur une semaine, ce qui permet néanmoins une approche sociale intéressante, histoire de ne pas débarquer comme des ploucs à les fixer comme s’ils étaient l’attraction d’une foire malsaine.
Nous passerons deux bonnes heures, je pense, dans la famille (c’est que cuisiner au feu déjà ça prend du teeemps) mais les échanges ne peuvent se faire que via Chu qui joue le rôle d’une intermédiaire parfaite pour nous permettre d’appréhender un peu cet autre monde, qui nous est clairement totalement inconnu. Dans ce genre de moment, on a plutôt envie de se faire tout petit, réalisant à quels besoins basiques se résument le mode de vie de ces minorités. Outre une pauvreté assez importante, une certaine spiritualité et culturelle nous sépare à des années lumières des uns et des autres. On tente donc d’en apprendre le plus possible et se faire aussi discret que possible, bien qu’aucun membre de la famille ne nous mette mal à l’aise. Cela relevait d’avantage d’un sentiment personnel que j’avais déjà ressenti à plusieurs reprises au cours de mon voyage. Nous poursuivrons finalement notre journée en redescendant de l’autre côté de la vallée à travers une nouvelle brume épaisse qui ne nous épargnera pas pour le reste de la randonnée. La traversée des rizières est très glissante voir quasi impraticable (se péter la gueule nous ? Nous jamaaais) et bien qu’on n’en regrette rien, on est malgré tout contentes de notre choix d’avoir un tout petit peu écourté le trek initial histoire que ça ne se transforme pas en mauvais souvenir. Nous attendrons finalement plus d’une bonne heure en bas de la route pour monter dans un taxi qui nous ramènera finalement à Sapa. Une seule journée, mais une journée intense, surprenante et surtout super enrichissante ! J’espère ne jamais oublier le visage de Chu qui m’a sincèrement marqué par sa bienveillance, son intelligence, son ouverture d’esprit sur le monde extérieur, son humilité et j’en passe…
Fatiguées mais malgré tout contentes de notre expédition, nous repartirons déjà au soir en bus de nuit vers la dernière mais pas la moindre destination de notre voyage au Vietnam : Cat Ba Island et la splendide Baie d’Halong. On y passera le nouvel an à notre plus grand bonheur et surtout on y retrouvera un peu de lumière et de soleil, ameeen. Afin d’éviter l’épicentre de la région touristique de la Baie d’Halong ,notre choix s’était donc tourné vers cette île un peu plus éloignée mais malgré tout très bien fournie qui permet d’appréhender les mêmes paysages avec quelques centaines de bateaux en moins, vous imaginez bien mon soulagement. Nouvel an dans une ambiance décontractée et reboostante, c’est dans un sacré mood que démarra l’année 2018. Expérience culinaire locale mais folklorique dans un restaurant flottant, se faire comprendre n’était pas du tout du tout évident, mais, mais on a bien rigolé et on a quand même mangé du bon poisson, même si c’est tout ce qu’on a réussi à commander.
Avant de nous lancer dans notre croisière finale de deux jours, nous passons d’abord deux autres jours sur l’île à reprendre des forces et à explorer le fabuleux parc national qui l’habite également. Au matin du 1er janvier, nous partons en scooter au bruit comme d’habitude pas du tout normal, en quête d’une nouvelle exploration. Sans trop en savoir plus que ça, nous entamons une ascension d’une bonne heure et demi dans les montagnes sauvages et vertes du parc national. Quelle fut notre surprise une fois arrivées au sommet. Nous nous étions préparées à une petite ballade de santé, et à la place on se retrouve sans trop comprendre comment, au sommet d’un fabuleux spectacle qui nous entoure de toute part. Un panorama à 360 degrés à couper le souffle. Oui, toi qui a passé le lendemain de la veille dans ton canapé avec une bonne gueule de bois, prends en de la graine mon vieux ! Rien de mieux qu’une bonne dose d’air pur et de nature pour se revigorer pour la nouvelle année. Belle surprise donc que nous réservait cette île. Entre ces forêts entremêlées de lianes à tout va, une multitude d’arbres immenses et ces collines à perte de vue, le paysage avait de quoi nous redonner la pêche.
On a donc apprécié le calme de Cat Ba Island, les cocktails en bord de mer, la nature dense et vivifiante du parc national et le plaisir de chiller un peu sans se presser. On a moins apprécié, ne pas dormir pendant deux jours, sommeil rythmé par le son du marteau piqueur des travaux voisins à l’hôtel mais bon vu l’environnement spectaculaire de la région, disons que nous nous en sommes accommodés.
La grande aventure de la Baie d’Halong nous attendait et ce fut sans aucun doute l’un de nos plus beaux et plus chauds souvenirs au Vietnam. Nous embarquions dès le lendemain avec OK, notre guide, oui il s’appelle OK, enfin du moins c’est ce qu’on a compris, en compagnie d’un couple canadien et d’un autre couple français pour notre croisière (ça fait luxueux hein de dire croisière ? Ouaai je sais). Les premières heures, nous ne cessions de marcher d’un bout à l’autre du bateau pour admirer le paysages des pics karstiques sortis tout droits de l’eau qui offrait une vision quelque peu idyllique de la Baie. Nous commençons par la Lanh Ha Bay pour ensuite traverser la « frontière » avec la Baie d’Halong pour finalement revenir à cette première. On ne savait plus où donner de la tête tellement le décor était splendide. On regarde à gauche, à droite, en haut, en bas (en bas ? oui position couchée pour tenter d’apercevoir les recoins les plus cachés par les formations rocheuses), et nos yeux se perdent dans l’infini d’un horizon marin sublimement illuminé. Découverte de villages flottants de pêcheurs, excursions en kayak à travers d’innombrables lagoons secrets, jouer aux cartes avec nos nouveaux copains, se marrer avec notre guide OK d’une nonchalance plutôt contagieuse, profiter simplement du paysage pendant des heures de traversée sur le bateau, rien n’était à redire pour notre fin de voyage.
Ces deux jours furent noyés d’une magie indescriptible qui n’a que pu nous convaincre de la beauté de la région. L’expérience fut complète, marrante, sereine, hypnotisante, bref fut merveilleuse pour résumer l’affaire ! Entre la pêche nocturne aux calamars, l’observation des planctons lumineux en kayak en soirée et la rencontre de chouettes compagnons de croisière, l’aventure n’avait pas fini de nous transporter de tous les côtés. Un must to do dans lequel se plonger au Vietnam sans hésiter ! Plus la croisière avançait, moins nous croisions de monde, ce qui avait l’air de ravir nos esprits d’aventuriers. La Baie d’Halong sans une horde de touristes enragés, c’était donc bien possible, pour notre plus grand plaisir. Escale sur une minuscule plage désertique au milieu de nulle part, fous-rires liés à une coordination au début un peu douteuse sur notre technique de kayak, impossible de vous en raconter les moindres anecdotes où je serais encore là dans deux jours (et ça me prend déjà deux jours d’écrire un article alors…). Aucun doute donc sur l’intérêt d’une telle activité qui certes coûte un peu cher mais qui en vaut la peine plus que jamais. C’est qu’on finirait presque par s’habituer à la splendeur de paysages variés (je vous dis pas comment l’idée de retrouver les ruelles bruxelloises pleine de pigeons ne m’enchante qu’à moitié après tout ça mais bon tout à son charme disons 🙂 ). On remercie donc chaque jour petit Jésus (ou pas) d’avoir la chance de vivre de telles choses et on profite de cette liberté sans limite d’aller où on veut, quand on veut, avec qui on veut, sur les routes d’un monde qu’on ne pourra jamais finir d’explorer (et tant mieux, ça donne de la matière pour la suite !).
Nous quittions le bateau en sautant littéralement sur un semblant d’autre minuscule bateau aux locaux un peu chelou voir oppressants pour rejoindre la terre et prendre notre bus direction Hanoi. Etait déjà venu le temps des au revoirs et du grand retour pour Fanny, alors que je restais plantée là au milieu de cette gigantesque capitale avec ma dent de sagesse qui sortait depuis une bonne semaine (le genre de truc qu’on kiffe bien en voyage, je vous dis pas). Repos post-traitement pendant quelques jours plus à Hanoi que j’explore malgré tout un peu, sans grande conviction je dois bien l’avouer, avant de finalement rejoindre Luang Prabang au Laos pour un nouveau mois de voyage en Asie du Sud-Est. Et c’sest ans imaginer le dixième de ce qui m’attendait encore, que je m’endormais pour la dernière fois, la tête pleine de nouveaux souvenirs de voyage. C’est qu’à force, j’ai l’impression de pas avoir assez de place pour tous les caser #donnezmoiundeuxièmecerveau. Heureusement que j’ai mes carnets de voyage pour ne pas en perdre une miette et me rappeler de cette incroyable aventure que je vis déjà depuis presque un an et demi maintenant.
A bientôt les copains pour la suite et restés accrochés parce que le Laos, ça a envoyé du lourd, je vous raconte pas ! Enfin si, je vous raconte, bientôt 🙂